film

Mysterious Island (Cyril Raker Endfield, 1961)


Mysterious Island (Cyril Raker Endfield, 1961)
titre original :Mysterious Island
titre français :L'Île Mystérieuse
titre international :Jules Verne's Mysterious Island
type :film, 101 min
année :1961
pays :États-Unis / Royaume-Uni
réalisation :Cyril Raker Endfield
scénario / adaptation :John Prebble, Daniel B. Ullman, Crane Wilbur
interprètes :Herbert Lom, Michael Craig, Joan Greenwood, Michael Callan, Gary Merrill
producteur :Charles H. Schneer
studio :Columbia
site web :http://imdb.com/title/tt0055207/


L'histoire

Dans cette adaptation qui prend de nombreuses libertés tout en conservant la ligne générale du récit vernien, le capitaine Nemo – se présentant après une heure de métrage – mène une expérience dont le but est d'éliminer la faim dans le monde, et donc par filiation, les guerres. Pour cela il a réussi à développer un moyen biologique qui permet d'augmenter la taille des êtres vivants comme ceux, fruits de ses expériences, que rencontrent tout le long de la première moitié du métrage les naufragés de l'air sur l'île : les huîtres d'une trentaine de centimètres, un crabe plus grand qu'un éléphant, ainsi qu'un oiseau haut sur pattes censé représenter un poulet géant et des abeilles de même dimension. On notera que le roman Place aux géants (La nourriture des dieux) écrit par H.G. Wells, en 1904, présente au début de l'ouvrage une expérience allant dans ce sens.
Ces animaux furent conçus et animés en stop motion par Ray Harryhausen (1920-2013). Celui-ci, en conservant une part de son ouvrage de base, avait notamment créé le gallinacé alors qu'une précédente version du scénario axé sur une faune plus particulièrement préhistorique devait présenter un Phororhacos. S'il perd ici l'occasion d'animer quelques dinosaures – ce qu'il affectionne particulièrement – comme précédemment dans le film documentaire The Animal World de Irwin Allen en 1956 (sans omettre également ses premiers courts expérimentaux dans les années 30, ainsi que le projet resté inachevé de The Valley of the Mist de Willis O'Brien en 1950, sans oublier Rhedosaurus, une créature qui empruntait quelque peu de la plastique dinosaurienne dans Le Monstre des temps perdus de Eugène Lourié en 1953), Ray Harryhausen pourra, peu de temps après, s'offrir à nouveau cette joie dans Un million d'années avant J.C. de Don Chaffey en 1966, ainsi que dans La Vallée de Gwangi de Jim O'Connolly en 1969.

Les scènes où apparaissent les créatures géantes sont bien évidemment des moments clés pour une telle oeuvre cinématographique dont le divertissement se veut être pleinement celui d'un film d'aventure reposant de fait en grande partie sur ces effets spéciaux, tel justement le King Kong de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack en 1933, dont Ray Harryhausen fut un adolescent admiratif de l'ouvrage réalisé par Willis O'Brien sur le gorille géant et les animaux préhistoriques... A cet égard, quelques paysages peints pour cette Île mystérieuse et certaines portées de la partition de Bernard Hermann renvoient aux atmosphères de l'île du Crâne. A propos du compositeur hitchcockien, il avait, deux ans plus tôt, signé la partition du magnifique Voyage au centre de la Terre de Henry Levin, ce qu'il fit également sur quelques autres films produits par Charles H. Schneer avec Ray Harryhausen à la conception des animations en volume, dont notamment l'un des plus célèbres, Jason et les Argonautes en 1963.

Les animaux extraordinaires sur cette île, qui originellement en est dépourvue, donnent également à la robinsonnade de Jules Verne un léger goût wellsien de par l'expérimentation du capitaine Nemo, sans atteindre tout de même la folie des recherches d'un docteur Moreau, mais aussi peut rappeler Voyage au centre de la Terre de par les dimensions de la faune particulière, les dites créatures, comme précédemment souligné, devant au début d'un premier ouvrage sur le scénario, être justement de l'ordre du Jurassique.

Parmi encore les animaux fantastiques présents en cette adaptation, le dernier se présentant à nos héros est un céphalopode dans une coquille, dont la forme emprunte à la fois à la pieuvre et à la seiche (quelques années plus tôt, en 1955, il avait animé un animal du même genre dans Le monstre vient de la mer de Robert Gordon). Évidemment, la créature fait pleinement référence au calmar géant de Vingt Mille Lieues sous les mers, celui de Disney étant encore dans tous les esprits, d'autant plus qu'elle apparaît lors d'une scène sous-marine absente du roman L'Île mystérieuse renvoyant à celle de l'odyssée du Nautilus, cela alors que le vaisseau des mers croise sur sa route les décombres de l'ancienne cité de l'Atlantide. En effet, en cette adaptation de Cy Endfield, alors que les naufragés équipés d'un appareil respiratoire en forme de coquillage conçu par le maître des lieux marchent sur le fond sablonneux bordant l'île – le but de cette balade étant de renflouer le navire des pirates coulé par le capitaine Nemo, au contraire de l'oeuvre originale où le navire est trop abîmé pour réaliser cette manœuvre –, ils découvrent les restes de ce qui semble être une cité antique de style grec. Cette idée suggérant ou présentant l'île comme une terre atlante sera pleinement reprise dans le scénario de Voyage au centre de la Terre 2 : l'île mystérieuse de Brad Peyton (long-métrage s'inspirant de celui de Cy Endfield), ce qui était fort logique puisque l'on trouve justement dans le texte de Jules Verne des allusions au légendaire continent disparu dans le Pacifique, l'Atlantide du grand océan, Mu.

Parmi encore les libertés prises pour notamment raccourcir le long récit de Jules Verne, la petite expédition sur l'îlot voisin est absente, car si Ayrton est tout de même encore présent dans cette aventure, il l'est d'une manière très différente puisqu'il n'est plus le sauvage vivant sur l'île Tabor et devenant un membre du groupe. En effet, il est ici tout simplement mort depuis longtemps, le capitaine Harding découvrant son squelette pendue à une corde, dans la grotte, le marin n'ayant pu supporter d'avoir été ainsi abandonné, seul, sur cette île. Cette absence est néanmoins comblée par deux nouveaux naufragés dont le navire a coulé et qui sont arrivés sans connaissance dans un canot qui s'est échoué près de la côte (pour rappel Cyrus Smith ainsi nommer Cyrus Harding dans les traductions anglo-saxonnes du roman ôte en partie le symbolisme présent dans le nom créé par Jules Verne liant le Christ et le forgeron). Les premiers naufragés découvrent ainsi le corps d'un homme qui a succombé à ses blessures, ainsi que ceux inanimés, mais tout de même encore bien vivants, de deux femmes. Cette présence féminine contribuera a apporter, en plus de l'aspect fantastique de la faune pour stimuler quelque peur, un léger brin de sensualité – tunique courte et douces formes – pour stimuler l'imagination masculine, sans aller aussi loin qu'une certaine Île aux dames de Pierre Louÿs – ce qui serait tout de même délicat à mettre en forme cinématographiquement –, celui-ci parodiant à l’extrême la robinsonnade de Jules Verne en un récit présentant un monde fonctionnant sous la gérance de la sexualité féminine. A cet égard, si le roman L'Île mystérieuse ne repose essentiellement que sur des personnages masculins comme nombre de récits verniens qui furent justement adaptés en y introduisant une présence féminine, et qui en partie à tort catalogue l'oeuvre du romancier comme quasiment essentiellement masculine, Jules Verne a tout de même écrit quelques aventures dessinant des personnages féminins aussi intéressants que ceux masculins beaucoup plus popularisés.

Malgré toutes ces intrusions dans le roman d'origine qui font la beauté de ce film, créatures géantes et personnages féminins, le capitaine Nemo conserve une certaine aura, même si elle est très différente de celui à la longue barbe qui se meurt de fatigue sous la plume de Jules Verne. Ce traitement du personnage inspirera très certainement celui interprété en 1973 par Omar Sharif. Sa fin sera tout de même la même, la mort, celle-ci intervenant alors qu'il aide les naufragés à fuir l'île menacée par son volcan. A la différence tout de même, que cette mort est intervenue alors qu'il tentait de sauver sa vie, le capitaine Nemo de Jules Verne attendant lui, apaisé, que celle-ci ne le prenne.

On notera, en dehors de quelques productions dérivées de ce film, qu'un projet original auquel Ray Harryhausen associera son nom fut réalisé en 2007 par les éditions Bluewater Productions. En effet, celles-ci reprendront très librement sous forme de comics un certain nombre de longs-métrages où Ray Harryhausen officia à l'animation. A cette occasion, Ray Harryhausen illustrera la couverture du 4ème et dernier volume de Back to Mysterious Island, profitant de l'occasion pour y dessiner une plante carnivore géante qui aurait pu apparaître dans le long-métrage de Cy Endfield – car présente dans le story-board –, mais dont la scène au final ne fut pas réalisée.

On soulignera enfin, toutefois sans pertinence aucune, que la série d'animation japonaise de science-fiction Mujin Wakusei Survive (2003-04) s'inspirant quelque peu du roman Deux ans de vacances de Jules Verne présente une île ayant quelques accointances fantastiques avec celle de Cy Endfield, dont la présence de plantes carnivores géantes si celle de Ray Harryhausen y était apparue.



Jacques Romero, 05/2013

Les images de la galerie sont © Ameran Films, Columbia Pictures


Galerie

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