roman

Thousand Years Under the Sea (John Peel, 2008)


Thousand Years Under the Sea (John Peel, 2008)
titre original :Thousand Years Under the Sea
titre français :Vingt mille ans sous les mers
type :nouvelle
année :2008
pays :États-Unis
auteur :John Peel
éditeur :Jean-Marc & Randy Lofficier
éditions :Black Coat Press (2008) / Rivière Blanche - Noire, 12 (2009)
collection :Tales of the Shadowmen, 4: Lords of Terror (2008) / Les Compagnons de l’Ombre, 3 (2009)
site web :http://www.riviereblanche.com/


A propos de cette œuvre

Tales of the Shadowmen / Les compagnons de l'ombre est une collection de recueils de nouvelles se situant dans le domaine du fantastique. Sa particularité est de regrouper des textes dont l'intrigue repose sur l'emprunt et l'utilisation de personnages populaires de la littérature. En ce sens, elle participe au mouvement créé par Philip José Farmer, le fameux WNU. Le capitaine Nemo ayant déjà fait l'objet de telles expériences littéraires, notamment par Farmer lui-même, il n'est donc pas étonnant qu'un écrivain fut à nouveau inspiré par ce personnage pour occuper, dans cette collection, une place parmi la multitude d'autres héros célèbres qui s'y côtoient.

John Peel, à qui l'on doit cette énième résurgence du héros vernien, est un auteur de récits, dont un certain nombre d'entre eux sont des novélisations d'œuvres télévisées, telles des séries comme Doctor Who, Star Trek, Au-delà du réel, ou encore pour un public un peu plus jeune Les incroyables pouvoirs d'Alex ou Eerie, Indiana alias Marshall et Simon. Il aborde Thousand Years Under the Sea / Vingt mille ans sous les mer, un peu à la manière de Michael Dibdin avec la nouvelle L’ultime défi de Sherlock Holmes. Dans celle-ci, le Docteur Watson (narrateur des aventures écrites par Doyle) venait de décédé. Mais il avait laissé dans son testament, un dernier récit concernant le plus grand des détectives, cette dernière histoire ne pouvant être révélée que bien après sa propre mort. Vingt mille ans sous les mer a ainsi pour narrateur le professeur Aronnax qui, au travers de son testament, se permet de revenir sur une conversation qu'il a partagé avec le capitaine Nemo lors de son périple à bord du Nautilus, celui-là même qu'il retranscrira dans Vingt mille lieues sous mers. Mais le contenu particulier de cet échange n'avait pas été inclus dans le récit qu'il fit de son aventure. Bien qu'ayant confiance en la personne du capitaine, il avait consciemment omis d'évoquer les propos de ce dernier, n'ayant pas été le témoin direct de l'étrange expérience que celui-ci avait pleinement vécue, et dont l'aspect fantastique et irréel dépassait de très loin l'incroyable mais plausible aventure qu'ils avaient partagée ensemble.

Ainsi le professeur Aronnax nous révèle en ce texte posthume, ce que le capitaine Nemo se décida à lui confier avec une certaine réticence, tellement ce qu'il avait vécu lui paraissait être en dehors de tout ce qu'il avait jusqu'alors connu : cela se passa ainsi, dans les premiers temps de navigation du Nautilus, lors d'une observation des fonds marins, que le capitaine situa vaguement dans les Antipodes, pour ne point tenter quelque autre aventurier de s'y risquer (on peut supposer à ce stade de l'histoire, si l'on prend comme référence l'Europe, puisque le capitaine s'adresse à un scientifique français, que ce lieu pourrait être situé dans le Pacifique sud, dans une zone éventuellement proche du Point Nemo, ce que confirmera l'objet final de la nouvelle...). Le capitaine et ses hommes découvrirent les ruines d'une cité antique qui ne pouvait être l'Atlantide, cette géographie n'ayant jamais été mentionnée dans aucun écrit comme lieu où reposerait ce continent. De plus, ils distinguèrent, en observant de près les diverses demeures et autres monuments, que cette architecture, proche de l'humaine, présentait toutefois comme une sorte de particularité régulière qui laissait entrevoir en leurs bâtisseurs, des êtres qui ne pouvaient être humains. La faune et la flore sous-marine semblaient également mystérieusement absentes en ce lieu. Mais lors de cette exploration, un incident vint mettre en panne le Nautilus. Il s'agissait en fait d'un sabotage. Suydam, l'un des membres de l'équipage, avait délibérément mis hors service un générateur pour lui permettre de quitter le sous-marin. Le capitaine Nemo aperçu alors cet américain, engoncer dans un scaphandre, pénétré dans une sorte de temple. La cabine de Suydam fut alors fouillée et il fut trouvé parmi ses écrits d'étranges notes comme celle-ci Dans sa demeure de R’lyeh, le défunt Cthulhu, rêve et attend (litanie issue du roman L'appel de Cthulhu) ce qui laissera supposer au capitaine que cet homme s'était engagé au sein de son équipage, dans l'intention de découvrir ou redécouvrir cette cité dont il avait sans doute connaissance de son existence, et d'y chercher ou de retrouver quelque chose de précis... Le capitaine Nemo, partira alors sur les pas de Suydam, et rencontrera Cthulhu, la mythique créature imaginée par Howard Phillips Lovecraft. Ainsi, dans ce passé que lui dessine John Peel, bien avant de le voir combattre au milieu des membres de céphalopodes géants, il avait combattu un être au gouffre tentaculaire... On soulignera que le nom de Suydam provient du personnage de Robert Suydam issu de la nouvelle Horreur à Red Hook (du recueil Dagon) écrite en 1925 par Lovecraft (certaines critiques voient particulièrement en ce texte, le racisme marqué de ce romancier, celui-ci usant clairement de certaines descriptions allant plus qu'en ce sens. Quant à savoir si cela était le reflet de ses véritables pensées...).

Contrairement à plusieurs récits de ce volume qui jouent avec un grand nombre de personnages, rendant parfois la lecture un peu encombrée par une diversité d'univers se côtoyant, John Peel, avec cette courte nouvelle usant seulement de quatre personnages principaux issus de deux univers différents, nous donne à lire un texte très fluide où l'histoire et son atmosphère prime avant tout avec une qualité narrative très soignée. De ce fait, il réussit à créer avec simplicité une ambiance proche de celles produites par Lovecraft, tout en nous offrant un capitaine Nemo élaboré dans une certaine sobriété scénaristique. Cette rencontre entre le héros vernien et Cthulhu avait déjà été orchestrée en 1990, par l'écrivain allemand Wolfgang Hohlbein dans Der Dagon-Zyklus du cycle Le Mage de Salem (volume non traduit en France). Plus récemment, en 2010, Richard D. Nolane a lui aussi proposé sa vision de cette rencontre entre ces deux entités de la littérature dans la bande dessinée 20 000 siècles sous les mers.

Dans cette même collection, John Peel avait précédemment mis en scène le personnage de Michel Strogoff dans une autre de ses nouvelles - The Incomplete Assassin - où celui-ci côtoyait le Rouletabille de Gaston Leroux. On retrouve également Jules Verne dans divers autres textes des Compagnons de l'ombre, comme dans ce présent volume, avec notamment la nouvelle La couronne du chaos écrite par le couple Lofficier (Jean-Marc et Randy, créateurs de cette collection dans sa version originale, mais aussi française) qui suit celle de John Peel. Cette nouvelle est originellement parue en 2005, dans le premier recueil de la collection Tales of the Shadowmen sous le titre anglais Journey to the center of chaos faisant écho au célèbre Voyage au centre de la Terre de Jules Verne. L'histoire est assez proche de Vingt mille ans sous les mer, puisqu'il s'agit ici d'offrir au lecteur une rencontre entre Robur et Tom Turner du roman vernien Robur le conquérant, avec Yog-Sothoth, autre entité issue de l'oeuvre de Howard Phillips Lovecraft. Dans cette nouvelle, on y trouvait Wilbur Watheley, un autre personnage de Lovecraft, ainsi qu'entre autre JimGrim de Talbot Mundy et Sâr Dubnotal de Norbert Sévestre, l'histoire se déroulant dans l'Inde des Thugs. Jean-Marc et Randy Lofficier s'étaient déjà familiarisés avec le personnage de Jules Verne, puisqu'ils avaient justement oeuvré précédemment à sa réutilisation dans la bande dessinée Robur illustrée par Gil Formosa.

Quelques variantes de choix s'effectuant sur la sélection des nouvelles incluses dans chaque volume de la collection entre la version originale en langue anglaise, et sa transposition en France avec quelques mois d'écart, donne parfois quelques différences dans les sommaires. Ainsi, la nouvelle de John Peel éditée dans le quatrième volume de l'édition originale, est apparue dès le troisième recueil en France. On notera également que le texte traduit de l'anglais souffre de quelques erreurs typographiques, de fautes d'orthographe s'en suivant, ou encore de quelques petits mots oubliés, certes qui ne gênent pas trop la lecture - quoique - mais que l'on rencontre tout de même beaucoup trop régulièrement sur toute la longueur de l'ouvrage, pour ne pas dire pratiquement à chaque page. De plus, ces erreurs semblent présentes depuis quelques années sur plusieurs volumes de cette collection. On peut regretter tout de même que ce type de maladresses ne soit pas corrigé, une simple relecture pouvant y remédier... cela est fort dommageable quant au regard que l'on peut prêter à cet éditeur. La fin du recueil est particulièrement intéressante puisqu'elle offre à nous renseigner sur tous les personnages utilisés pour chaque nouvelle, ce qui pour certaines, comme celle que nous évoquons ici semble quelque peu superflu, mais ne l'est point pour d'autres usant d'une multitude de protagonistes issus de nombreux romans, pour certains encore très populaires, et pour d'autres qui le furent.

Jacques Romero, 05/2010


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